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Harold a parlé et bien parlé. Les discours des prix Nobel sont en général des exercice d'auto-masturbation très élaborés puisqu'il leur est demandé de parler de leur oeuvre, leur art, leur nombril. Bien évidemment, pour quelqu'un d'aussi politiquement engagé qu'Harold Pinter, s'attarder sur son oeuvre, c'est un magnifique prétexte pour parler de politique internationale, et en particulier de politique américaine.
Je ne saurais trop vous conseiller de lire ce texte, d'autant plus que le site des Nobels a la gracieuseté de fournir le texte en français, en anglais, en allemand, et en suédois. C'est comme les Nation-Unies. Ca tombe bien, c'est un discours qu'on aurait dû entendre aux Nations-Unies depuis très longtemps. Et pour vous donner envie :
La vérité est totalement différente. La vérité est liée à la façon dont les États-Unis comprennent leur rôle dans le monde et la façon dont ils choisissent de l’incarner.
Mais avant de revenir au temps présent, j’aimerais considérer l’histoire récente, j’entends par là la politique étrangère des États-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Je crois qu’il est pour nous impératif de soumettre cette période à un examen rigoureux, quoique limité, forcément, par le temps dont nous disposons ici.
Tout le monde sait ce qui s’est passé en Union Soviétique et dans toute l’Europe de l’Est durant l’après-guerre : la brutalité systématique, les atrocités largement répandues, la répression impitoyable de toute pensée indépendante. Tout cela a été pleinement documenté et attesté.
Mais je soutiens que les crimes commis par les États-Unis durant cette même période n’ont été que superficiellement rapportés, encore moins documentés, encore moins reconnus, encore moins identifiés à des crimes tout court. Je crois que la question doit être abordée et que la vérité a un rapport évident avec l’état actuel du monde. Bien que limitées, dans une certaine mesure, par l’existence de l’Union Soviétique, les actions menées dans le monde entier par les États-Unis donnaient clairement à entendre qu’ils avaient décrété avoir carte blanche pour faire ce qu’ils voulaient.
L’invasion directe d’un état souverain n’a jamais été, de fait, la méthode privilégiée de l’Amérique. Dans l’ensemble, elle préférait ce qu’elle a qualifié de « conflit de faible intensité ». « Conflit de faible intensité », cela veut dire que des milliers de gens meurent, mais plus lentement que si vous lâchiez une bombe sur eux d’un seul coup.Cela veut dire que vous contaminez le cœur du pays, que vous y implantez une tumeur maligne et que vous observez s’étendre la gangrène. Une fois que le peuple a été soumis – ou battu à mort – ça revient au même – et que vos amis, les militaires et les grandes sociétés commerciales, sont confortablement installés au pouvoir, vous allez devant les caméras et vous déclarez que la démocratie l’a emporté. C’était monnaie courante dans la politique étrangère américaine dans les années auxquelles je fais allusion.
Les réactions : Attaque cinglante de Harold Pinter contre la politique étrangère américaine, Le Devoir
Harold Pinter veut voir juger Bush et Blair pour la guerre en Irak , Yahoo!Actualités
Irak : Bush et Blair devraient être jugés selon Harold Pinter, Le Monde
Passionate Pinter's devastating assault on US foreign policy, The Guardian
Pinter rails against US in Nobel prize speech , Daily Telegraph
A Nobelist's cri de coeur, International Herald Tribune