La Muselivre

L'an dernier encore, c'était à la mode. Le premier roman. Le petit jeune qui a des choses à dire, même si tout le monde s'en fout, des choses à écrire, mais s'il a un style de hussard qui a très très mal digéré son Beckett. Le petit nouveau qui attendait encore que ses dents de sagesse poussent pour se les faire enlever, et que son bac se passe pour avoir l'air enfin grand.

L'an dernier, les merdeux précoces était encore à la mode. Cette annnée, fini, finito, has been, dégagez ! 96 premiers romans publiés au cours de cette rentrée, contre 121 l'an dernier, c'est l'hécatombe. On n'avait pas publié aussi peu de premier romans à la rentrée depuis que César et sa Guerre des Gaules bataillait en tête de gondoles avec l'Alésia de Vercingatorix.

Comprenez bien bonne gens. Le jeunisme ça va bien deux minutes, mais c'est fatiguant au bout d'un moment de tenir le rythme entre deux barbes à papa, et les vieux tamagochis de ta mère qui meurent en poussant des hurlements digne d'un raptor à la Spielberg. Tout ça, ça ne vaut plus rien. L'angoise de la chiarde avant l'ingestion de sa première pilule, le stress du boutonneux devant sa première érection, d'un seul coup, ça n'est plus aussi intéressant.

Dommage. Parce qu'à la rentrée, on trouvait aussi de bons premiers romans, écrits par des gens majeurs pour qui l'extase de la première ligne de coke n'était pas l'apha et l'omega de la vie littéraire. Mais ça, c'est quelque chose qui n'a traversé l'esprit d'aucun critiques, et pour trouver une ligne sur l'un des (quand même !!) 96 premiers romans de la rentrée, il faut se lever tôt.

Seul l'express s'est -- enfin -- fendu d'un cahier livres spécial premiers romans, mais ne cherchez pas de grandes critiques, ils n'ont probablement pas eu le temps de lire les livres. Quand on a Houellebecq, d'Ormesson, et Nothomb à se mettre sous la dent, peut-on vraiment penser à lire autre chose ?

A voir pour les extraits de Pissenlits et petits oignons de Thomas Paris et de L'Intérieur de la nuit de Léonora Miano.