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    Amusant, ça.

    Hier, en apprenant la nouvelle de l'attribution du Nobel de littérature à Harold Pinter ("qui dans ses drames découvre l’abîme sous les bavardages et se force un passage dans la pièce close de l’oppression" : qui dit mieux que l'Académie ?), j'y ai vu un classicisme certain et une certaine frilosité de la part de l'Académie. Pinter est si connu, si reconnu qu'il est traduit dans 30 pays, que son opposition à la guerre d'Irak fait le tour du monde, et que son nom a déjà donné lieu à un adjectif : "pinteresque". Quand on est déjà couronné par la postérité avant même d'être mort (et ce n'est probablement pas pour tout de suite, malgré ses 75 ans, puisque son cancer est en voie de rémission) au même titre qu'un flaubert flaubertien, un balzac balzacien et un hugo hugolien, le Nobel apparaît plus comme une cerise sur le gâteau qu'autre chose.

    On avait connu les Nobel plus originaux (Toni Morrisson, huitième femme à le recevoir, première noire, pour une oeuvre d'à peine cinq livres à l'époque), plus découvreurs  (Gao Xingjian, ce qui était également un pied de nez à la Chine qu'il avait fuit), plus redécouvreurs (Imre Kertész qui leur dit merci), plus provocateurs (Elfriede Jelineke, qui est très très loin d'être un auteur qui fait l'unanimité au niveau de ses talents littéraires).

    Mais visiblement je suis l'une des seules à trouver que récompenser Pinter est un choix moins dangereux que de récompenser Orhan Pamuk ou un obscur critique littéraire polonais. Il est vrai que Pinter n'est pas que dramaturge, poète scénariste et occasionnellement réalistaeur du film La maitresse du Lieutenant Français d'après le roman de John Fowles : c'est aussi un gauchiste anti-Bush, anti-Blair, pacifiste engagé obstiné, anti-guerre d'Irak, défenseur des Droits de l'Homme. Et puis c'est un londonien, donc forcément très grande gueule. 

    Son oeuvre (disponible chez Gallimard, du théâtre, principalement, mais aussi son unique roman Les nains, ains que des poème dans La Guerre. Chez Bûchet -Chastel, on trouve aussi Autres voix, un recueil de prose, de poésie et de politique couvrant la période 1948-1998, ) est bien sûr fortement influencée par ses engagements politiques, et nul doute que c'est une partie de ce que voulait récompenser les Nobel : mais si leur idée était de faire un coup d'éclat ou un pied de nez aux américains et autres ennemis de Pinter, je la trouve un peu dégonflée la baudruche des Nobels. C'était il y a deux ans, quand il se battait le plus contre la guerre en Irak, qu'il fallait récompenser Pinter. Dommage, cela aurait été faire encore plus honneur au lauréat que de le faire à ce moment-là.

    En tout cas, ce Nobel fait drôlement parler de lui :

    Il y a ce qu'en dit l'intéressé, et ce que disent tous les autres (et en français aussi, bien sûr).

    Pour des extraits sonores de deux textes de Pinter, c'est par ici.

    Ecrit par Heileen, à 14:54 dans la rubrique "Littérature anglo-saxonne".



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